Pour favoriser la démocratie en entreprise et faciliter l'organisation et le suivi des élections professionnelles, les systèmes de vote électronique sont de plus en plus souvent mis en place au sein des entreprises.
Bon à savoir : la loi Travail du 8 août 2016 a facilité le recours au vote électronique en prévoyant qu'à défaut d'accord d'entreprise ou de groupe, le vote électronique peut avoir lieu « si l'employeur le décide » (article R. 2314-5 du Code du travail, issu du décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017). Une tentative loyale de négociation doit cependant avoir eu lieu (Cass. soc., 13 janvier 2021, n° 19-23.533).
Ces systèmes font appel à des traitements de données à caractère personnel des votants. Celles-ci doivent être protégées, d’autant qu’il s’agit de données sensibles portant sur des élections syndicales ou politiques... Essayons d'y voir clair.
Avantages du vote électronique pour les élections professionnelles
Le vote électronique en entreprise permet de simplifier l’organisation et le dépouillement des scrutins. En effet :
- il est possible de voter quel que soit le lieu où se trouve le salarié, tant qu'il est connecté à Internet, et ce quelle que soit l'heure ;
- le dépouillement est simplifié ;
- les résultats sont publiés rapidement ;
- il y a une dématérialisation des bulletins de vote, ce qui s'inscrit dans les objectifs du développement durable.
Important : l’employeur est tenu de négocier avec toutes les organisations syndicales intéressées. Son refus de négocier avec une organisation syndicale intéressée entraîne en lui-même l’annulation des élections (Cass. soc., 28 février 2018, n° 17-60.112).
À noter : si un employeur ne répond pas à son obligation de mise en place d'institutions représentatives du personnel et qu'aucun procès-verbal de carence n'est établi, il commet une faute qui cause un préjudice aux salariés. Ces derniers n'ont, en outre, pas besoin de rapporter la preuve d'un préjudice pour obtenir la condamnation de l'employeur à leur verser des dommages et intérêts (Cass. soc., 8 janvier 2020, n° 18-20.591).
Contraintes légales du vote électronique pour les élections professionnelles
La mise en place des systèmes de vote électronique impose à l'entreprise de :
- prendre toutes précautions utiles, au regard de la nature des données et des risques présentés par le traitement, pour préserver la sécurité de ces données ;
- se conformer aux recommandations de la CNIL sur le vote électronique.
Le vote par Internet est en effet encadré par une recommandation de la CNIL du 21 octobre 2010, qui prévoit des mesures de sécurité particulières nécessitant par exemple qu'une société d'experts indépendants valide la solution technique retenue par l'entreprise.
Bon à savoir : le vote électronique nécessitait la conclusion d'un accord collectif. La loi Travail du 8 août 2016 est venue faciliter le recours au vote électronique en prévoyant qu'à défaut d'accord d'entreprise ou de groupe, le vote électronique peut avoir lieu « si l'employeur le décide » (article R. 2314-5 du Code du travail, issu du décret n° 2017-1819 du 29 décembre 2017).
Dans tous les cas, le vote par Internet doit respecter les grands principes électoraux, notamment le secret et la liberté du vote :
- L'identifiant et le mot de passe des électeurs doivent être transmis par des moyens différents (ex : l'un par courrier papier et l'autre par email) pour éviter les usurpations d'identité et garantir le vote secret. Ces codes ne sont valables que pour une session de vote.
- La CNIL exige également qu'il existe deux systèmes informatiques différents et cloisonnés : le premier qui concerne l'émargement des électeurs et le second qui recense les votes. Il est ainsi impossible de faire un lien entre l’identité de l’électeur et son choix de vote.
- L'exercice personnel du droit de vote constitue un principe général du droit électoral auquel l’entreprise ne peut pas déroger : un salarié ne peut pas voter à la place d’un autre, même si les clés de vote lui ont été confiées par son titulaire (Cass. soc., 3 octobre 2018, n° 17-29.022).
Responsabilité de l'entreprise lors du vote électronique pour des élections professionnelles
Contrairement à ce que semblent penser les entreprises, ces obligations légales ne s’éteignent pas lorsqu'elles font appel à un prestataire extérieur, même s’il est connu sur le marché des applications de vote électronique.
C’est ce qu’a rappelé la CNIL lors de la condamnation de Total raffinage marketing. Dans cette affaire :
- un syndicat avait porté plainte auprès de la CNIL pour non-conformité du système de vote électronique dit « Election Central » ;
- pour sa défense, Total raffinage marketing avait mis en avant le fait que son système n’avait jamais été remis en cause par les juridictions et qu'elle avait fait appel à un prestataire spécialisé ;
- la CNIL a jugé ces moyens inappropriés, car Total raffinage marketing est responsable aux yeux de la CNIL des manquements à la loi « Informatique et Libertés ».
En effet, conformément à l'article 24 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 (RGPD), même si le contrat protège le responsable de traitement, il reste seul responsable face à la CNIL.
Pour en savoir plus :
- Le droit du travail : un domaine complexe et évolutif, concernant toutes les normes régissant le contrat entre employé et employeur. Le point grâce à nos informations précises et détaillées.
- Pour tout savoir sur les élections des représentants du personnel : règles, procédures, calendrier.
- Nous mettons à votre disposition une ressource utile : un modèle de lettre pour la déclaration à la CNIL du vote électronique pour les délégués professionnels d'une entreprise. À noter que ce document n'est plus utile depuis le 25 mai 2018, date d'entrée en vigueur du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 (RGPD).