À chaque fois qu’un accident se produit dans l’entreprise, il apparaît utile de rechercher toutes les causes qui peuvent en être à l’origine. On procède alors à l’analyse des accidents du travail. Cette analyse contribue à améliorer la prévention des risques professionnels.
Toutefois, procéder à l’analyse d’un accident du travail ne consiste pas à définir des responsabilités ou encore, à déterminer des coupables. En effet, analyser les accidents du travail doit essentiellement permettre de mettre en place des mesures de prévention et d’éviter qu’un accident du même type ne se reproduise ou que d'autres accidents ne se produisent.
Exemple 1 : un salarié, souffrant de douleurs en se rendant sur son lieu de travail, est victime d'un infarctus dans la salle de pause de l'entreprise. Selon l’employeur, le salarié ayant ressenti les premiers symptômes de son malaise durant le trajet de son domicile jusqu'à son lieu de travail et n'ayant pas encore pris son poste de travail, l’origine professionnelle de l’accident doit être écartée. Or, pour la Cour de cassation, la présomption d’imputabilité de l’accident au travail s’applique ici. En effet, l'existence de symptômes préalables au malaise, pendant le trajet entre le domicile et le lieu de travail, n'est pas de nature à caractériser un accident de trajet, le malaise ayant eu lieu sur le temps et le lieu de travail sous l'autorité de l'employeur (Cass. 2e civ., 29 mai 2019, n° 18-16.183).
Exemple 2 : un malaise cardiaque survenu pendant le temps et sur le lieu de travail est présumé être un accident du travail. La présomption d’imputabilité ne peut être renversée qu’en apportant la preuve que la cause de l’accident est totalement étrangère au travail. Le seul fait de démontrer que les conditions de travail étaient saines ne suffit pas à renverser la présomption d’imputabilité inhérente à l’accident du travail (Cass. 2e civ., 11 juillet 2019, n° 18-19.160).
Groupe de travail et analyse des accidents du travail
L’analyse d’un accident du travail ne peut être la mission d’un seul homme. En effet, cette analyse doit être conduite par un groupe de travail pluridisciplinaire.
Ce groupe doit notamment se composer des membres du CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) ou à défaut des délégués du personnel, du conseiller ou de l’assistant de prévention, du responsable hiérarchique de l'accidenté ou encore, de toute personne pouvant apporter des éléments de réponse (par exemple, la personne accidentée elle-même, les témoins, les experts ou les spécialistes, etc.).
Les organismes de prévention (CARSAT, OPPBTP, médecine du travail, etc.) sont également des partenaires essentiels dans l’analyse des accidents. Ils proposent d’ailleurs un accompagnement ou des formations liées à l’analyse des accidents de travail.
Réaliser une analyse des accidents du travail en groupe permet non seulement de s’assurer que toutes les causes éventuelles ont bien été identifiées mais aussi d’impliquer un grand nombre de salariés dans le choix des mesures de prévention.
Analyse d’un accident du travail : les étapes
Une analyse complète d’accident de travail doit comporter les étapes suivantes :
- le recueil des faits ;
- l’analyse des faits et la réalisation de l’arbre des causes ;
- le choix des mesures de prévention ;
- le contrôle, le suivi de la réalisation et de l’efficacité des mesures de prévention.
Comment effectuer le recueil des faits ?
La qualité de l’analyse repose prioritairement sur les informations que le responsable sécurité va pouvoir récolter. Ainsi, il est essentiel de démarrer l’enquête le plus tôt possible et de vérifier méthodiquement la véracité des éléments réunis.
Pour savoir ce qui s’est réellement passé, il peut être intéressant d’effectuer une reconstitution de l’accident sur place. Cette reconstitution doit être faite en présence de la victime (ou des victimes) si elle peut être présente (elles peuvent être présentes), des témoins mais aussi du responsable hiérarchique du salarié(s) accidenté(s) et/ou du CHSCT. Par ailleurs, des photos de la reconstitution ou de l’accident permettent d’enrichir l’analyse.
Le recueil des faits comporte les témoignages de la ou des victime(s), des témoins, mais aussi le détail des circonstances de l’accident.
Le recours à la méthode des 5M permet de s’assurer que l’on possède toutes les informations nécessaires à l’analyse.La méthode des 5M (également appelé le diagramme d’Ishikawa) est un outil qui permet d’identifier les causes d’un problème et de fournir des éléments pour étudier des solutions. Comme son nom l’indique, cette méthode classe les causes selon 5 grandes familles :
- matière : matière première, fourniture, pièces, qualité ;
- matériel : machines, outils, équipement, maintenance ;
- main d’œuvre : directe, indirecte, motivation, formation, absentéisme, expérience, problème de compétence ;
- milieu : environnement physique, lumière, bruit, poussière, localisation, aménagement, température ;
- méthode : instructions, procédures, modes opératoires utilisés.
En général, le recueil des faits permet de mettre en avant la multi-causalité de l’accident.
Comment réaliser l’arbre des causes ?
La méthode de l’arbre des causes se base sur la recherche des faits et la prise en compte de l’ensemble des composantes techniques, organisationnelles, humaines de l’activité et leurs interactions.
L’arbre des causes est une représentation graphique permettant de visualiser l’enchaînement logique des faits ayant provoqué l’accident. L’arbre des causes met en avant un enchaînement logique. Il doit exister une relation entre les faits. Toutefois, ces faits ont pu se dérouler de manière simultanée ou au contraire, éloignée dans le temps.
En pratique, l’arbre des causes se construit de droite à gauche, c'est-à-dire du pourquoi au comment. La lecture de gauche à droite correspond alors à l'enchaînement logique des faits.
À droite du tableau, on note l'accident. C'est le point de départ. Ensuite, on détermine la ou les causes primaires en se posant la question « Qu'a t-il fallu pour que l’accident survienne ? ». Puis, pour chaque cause trouvée, on détermine les causes secondaires. Deux questions doivent être posées : « Est-ce que le fait X a été nécessaire pour que le fait suivant Y apparaisse ? » et « Est-ce que le fait X a été suffisant pour que le fait suivant Y apparaisse ? ».
Comment choisir les mesures de prévention, en assurer le contrôle, le suivi et l’efficacité ?
Dès lors que l’arbre des causes est terminé, il est nécessaire de retenir les mesures de prévention les plus adaptées. En effet, l’arbre des causes aide à ouvrir le champ des mesures de prévention possibles : mesures liées à la réglementation, mesures liées à la formation, mesures organisationnelles, etc. On ne se limite plus aux mesures de protection individuelle ou au rappel des consignes.
Un plan d’actions doit mentionner les mesures de prévention retenues. Ce plan doit d’ailleurs préciser les délais d’application ainsi que les moyens permettant de contrôler l’efficacité des mesures de prévention.