
La mise à pied fait partie de ces choses qu'on ne vous souhaite pas, mais qui risquent quand même de vous arriver. Voici tous nos conseils pour la voir venir et l'éviter, ainsi que pour savoir comment elle fonctionne.
Mise à pied : une mesure de sanction
La mise à pied est une mesure qui relève du pouvoir discrétionnaire de sanction de l'employeur qui constate une faute suffisamment grave de son salarié.
- Elle est notifiée par l’employeur à son salarié par écrit.
- Elle a pour effet de suspendre l’exécution du contrat de travail de ce salarié.
En d'autres mots, un salarié mis à pied ne doit plus se rendre sur son lieu de travail et ne doit plus accomplir ses missions relevant de son contrat de travail. En outre, le salarié n'est pas rémunéré pendant cette période.
Bon à savoir : si le salarié mis à pied se rend dans les locaux de l'entreprise de son propre chef et est victime d'un accident, la qualification d'accident du travail ne pourra pas être retenue (Cass. 2e civ., 21 septembre 2017, n° 16-17.580). En revanche, si la présence du salarié dans les locaux de la société résulte d'une demande de l'employeur, l'accident pourra être qualifié d'accident du travail (cas du salarié qui se rend dans l'entreprise pour un entretien préalable à un licenciement, par exemple).
À noter : le salarié peut se voir payer la période de mise à pied si la sanction n'était pas motivée par une faute suffisamment grave.
Selon qu'elle est conservatoire ou disciplinaire, la mise à pied suit des règles de procédure distinctes.
Mise à pied conservatoire : préalable à la sanction
La mise à pied conservatoire d'un salarié n'est pas une sanction, mais un préalable à la sanction.
Le salarié doit avoir commis une faute particulièrement grave qui nuit au bon fonctionnement de l’entreprise, car la mise à pied conservatoire a pour effet d'empêcher le salarié d'accéder aux locaux de l'entreprise.
Le salarié n'est pas payé le temps de la mise à pied, et n'est pas maintenu dans l’entreprise. Il ne peut plus exercer ses fonctions ni accéder aux données de l'entreprise.
Dans la majorité des cas, la mise à pied conservatoire aboutit à un licenciement. La mise à pied peut être orale ou écrite, mais comme il revient à l'employeur de prouver la date de la mise à pied, il lui est recommandé de le faire par écrit.
Une fois la mise à pied conservatoire signifiée, la procédure de sanction disciplinaire et/ou de licenciement est déclenchée. À ce titre, l'ouverture de la procédure disciplinaire doit respecter les règles de procédures prévues par le Code du travail et notamment l'entretien préalable et la notification de la décision de l'employeur.
Important : le délai entre la mise à pied conservatoire et l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable doit être très court, afin que la mise à pied présente bien un caractère conservatoire et non disciplinaire (car on ne peut pas sanctionner deux fois un salarié pour la même faute). Un délai de 7 jours a ainsi été jugé trop long par la Cour de cassation (Cass. soc., 14 avril 2021, n° 20-12.920).
Bon à savoir : dès lors qu’un salarié critique de manière systématique les orientations stratégiques et commerciales d’un responsable, et remet en cause régulièrement son autorité sans modifier son comportement malgré plusieurs rappels à l’ordre, il est considéré comme commettant des fautes sanctionnables par un licenciement disciplinaire. En effet, selon les juges, l’insubordination relève du droit disciplinaire (Cass. soc., 21 octobre 2020, 19-15.453).
Mise à pied : sanction disciplinaire
La mise à pied disciplinaire d'un salarié est une sanction prise par l’employeur en réaction à un comportement fautif et grave de ce salarié :
- La mise à pied disciplinaire doit être limitée dans le temps et reposer sur une faute suffisamment grave au regard de la perte de salaire pour le salarié sanctionné.
- Le salarié n'est pas payé le temps de la mise à pied, mais il peut être maintenu dans l’entreprise et reprendre ses fonctions.
- La contestation étant possible pour le salarié, l'employeur doit pouvoir justifier de la réalité de la faute du salarié.
À noter : la contestation devra être faite par le salarié devant le conseil des prud'hommes qui pourra apprécier la proportionnalité de la sanction au regard de la faute commise par le salarié.
Par ailleurs, un employeur ne peut prononcer une sanction disciplinaire, telle qu'une mise à pied, que si elle est prévue par le règlement intérieur.
Bon à savoir : pour être opposable au salarié, le règlement intérieur doit être accessible. Dans le cas contraire, l’employeur ne peut pas prononcer une sanction disciplinaire, sous peine d’être annulée (Cass. soc., 1er juillet 2020, n° 18-24.556).
Attention la procédure de mise à pied disciplinaire est strictement encadrée par la loi :
- Le salarié doit être convoqué à un entretien préalable par écrit.
- Si à l'issu de cet entretien l'employeur souhaite mettre à pied disciplinairement le salarié, il devra lui signifier par écrit avec un effet au moins 2 jours après l'entretien et au plus tard 1 mois après cet entretien.
- Le courrier devra notamment préciser exactement la durée de la mise à pied.
Bon à savoir : lorsqu'un salarié protégé fait l'objet d'une mise à pied conservatoire, l'employeur a l'obligation de saisir l'inspecteur du travail dans les plus brefs délais sous peine de nullité du licenciement (Cass. soc., 4 juillet 2018, n° 16-26.860).
À noter : dès lors que le salarié refuse une mesure disciplinaire entraînant une modification de son contrat de travail, telle qu'une rétrogradation, notifiée après un entretien préalable, l'employeur n'est pas tenu de le convoquer à un nouvel entretien préalable s'il prononce une sanction de substitution, sauf si cette sanction de substitution est le licenciement (Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-11.433).
L'annulation du licenciement d'un salarié protégé entraine l'annulation de sa mise à pied et de ses effets. Par conséquent, le salarié doit retrouver son poste (et non un poste similaire) et les salaires non perçus pendant cette période doivent lui être versés (Cass. soc., 29 mars 2023, n° 21-25.259).
Pour aller plus loin :
- Vie privée du salarié au travail : quelles sont les erreurs à ne pas commettre ?
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- Vous y avez forcément droit, mais savez-vous pourquoi et sous quelles conditions ? Zoom sur le repos hebdomadaire.